Vernissage le vendredi 18 octobre à partir de 18h30
« Garçon triste prolifique » rassemble des œuvres récentes de l’artiste français Antoine Donzeaud. L’exposition évoque le morcellement du flux digital et les contradictions de l’être pris dans les affres urbains d’une postmodernité ambigüe et vacillante. Le titre-portrait souligne l’ironie de l’artiste face aux variations de la carrière, aux tiraillements produits par la complexité de l’interrelation des images et des êtres.
Le titre de l’exposition est une proposition de traduction en français du nom de scène d’un jeune rappeur américain : « Sadboyprolific ». Lycéen, il poste ses chansons sur Youtube et Instagram. Il aborde le mal-être de l’adolescence, ses pulsions suicidaires, la fuite dans les drogues, comme la marijuana. L’exposition se déploie en des espaces assimilables à une habitation, avec sa réalité domestique. Cette approche permet de créer des liens d’anecdotes et des rebonds esthétiques entre l’histoire des Limbes et les œuvres présentées.
L’œuvre « Vanity Boy » est un vanity case, doté d’un mince miroir sur le revers du couvercle. L’objet est rempli de bris de verre blanc évoquant le « primavérisme »* effervescent d’un âge heurté par les humeurs et les contradictions, le morcellement de l’être, la transparence de la masse.
« Suspended Stories » agrège en une structure horizontale accrochée à hauteur de plafond le geste pictural et l’image prélevée, dans une expérience de restitution d’un moment intime. L’œuvre évoque par extension une voute sous laquelle l’intériorité du soi s’étend en un même espace-temps, sans cesse traversé par la potentielle cascade des images et des réminiscences digitales.
Avec les œuvres « Yellow Monochrome » et « Grey/Blue Monochrome », dont les couleurs font écho aux « Suspended Stories », le lit est envisagé comme l’image première et dernière d’une représentation de l’intime : le lever et le coucher. Les draps immaculés, froissés par les mouvements d’un corps deviennent par suggestion totémique le monochrome rose de la génération des millennials.
Avec « Broken Windows », Antoine Donzeaud traverse la paroi de l’intimité intérieure et elle s’inscrit dans la continuité d’un travail de déplacements des médiums, dans la perspective d’une synthèse expérimentale de la sculpture et de la peinture. Le verre de chaque élément est teinté à la peinture aérosol. Il évoque à la fois la référence au monochrome et à l’objet vernaculaire. Brisés dans un geste final aléatoire, le résultat désigne le bris comme la preuve d’une action de destruction et par extension de soustraction. La série s’inscrit dans une évocation métaphorique de la dévastation d’un environnement urbain.
Maelstrom de la chambre, sinuosité des draps, couleurs primaires, scrolls infinis…Entre postromantisme urbain et hypersensibilité digitale, « Garçon triste prolifique » propose une projection dans la mesure d’un corps hybride et transitoire qui cherche, dans une inlassable quête le reflet de ses fantômes et l’ombre de ses désirs.
Théo-Mario Coppola
* Le terme « primavérisme » renvoie aux recherches de Tristan Garcia développées dans son ouvrage « La vie intense : une obsession moderne »
http://www.antoinedonzeaud.com/